
Allgower Marua’e, le parcours inspirant d’un athlète
Plusieurs fois champion de tennis de table, champion du monde de va’a et engagé dans l’inclusion de personnes en situation de handicap, Allgower Marua’e est plein de surprises. Hommes de Polynésie vous présente un athlète d’une force rare, tant mentale que physique.
UNE VOCATION EXALTANT DU VÉCU
Allgower Marua’e est atteint de dystrophie1 dès la naissance.
« J’ai une malformation à la jambe gauche et à la main droite. »
Un peu avant son premier anniversaire, il est amputé d’une partie de la jambe, au niveau du genou. À la place, il porte désormais une prothèse.
« Jusqu’à mes 18 ans, j’ai été appareillé en France. »

Il grandit en faisant des allers-retours entre l’Hexagone et la Polynésie, accompagné de sa maman. Mais à sa majorité, il se fait enfin suivre localement. Ce même centre offre une place dans son équipe de technicien orthoprothésistes, et l’adulte en devenir voit l’opportunité de rendre un peu de ce qui lui a été donné.
« Depuis que j’ai 20 ans, je fabrique des prothèses sur mesure pour les patients. »
Grâce à son métier, il rencontre des personnes vivant des situations similaires à la sienne. Ainsi, il élargit ses horizons, et partage son expérience.
« Dès que je vois des personnes aptes à faire du sport, je les y encourage. J’essaie en tout cas. Une activité physique, ça ne peut que faire du bien. »
AU-DELÀ DES LIMITES
Si certains préjugés subsistent à l’égard des personnes porteuses de handicap, Allgower Marua’e en est le contre-exemple parfait.
« J’aimais bien le tennis de table à l’école. »

Passionné par les activités sportives, il s’intéresse très jeune au ping-pong, et se qualifie rapidement pour des championnats interscolaires. Il remporte la première place à plusieurs reprises. En 2019, il décroche la médaille de bronze des Jeux du Pacifique dans cette discipline, et la médaille d’or en 2023.
« En 2018, j’ai découvert le va’a en tant que sport, j’ai carrément accroché et, depuis, je n’arrête plus. »
Le jeune homme devient un rameur aguerri en un rien de temps, et obtient le titre de champion du monde de va’a en 2023.
« Au début, c’était une façon de me prouver que je pouvais faire quelque chose malgré mon handicap. Surtout le va’a, à cause de ma main. »

Véritable athlète, Allgower s’entraîne tous les jour au sein club Ihilani Va’a en plus de son travail en orthopédie.
« Ça me fait du bien… C’est une bonne manière de se maintenir en forme et d’avoir une bonne hygiène de vie. »
L’AMOUR D’UNE FAMILLE
Si Allgower Marua’e semble relever seul tous les obstacles posés sur son chemin, il est très bien entouré.
« Ma famille me soutient depuis que je suis petit, c’est grâce à eux que je suis là aujourd’hui. »

Heureux en ménage et père de deux adolescentes, il est encouragé dans sa trajectoire par sa compagne et ses filles.
« Nous sommes une belle famille recomposée, ma compagne a deux garçons, moi une fille, et nous avons eu une fille ensemble. Ça fait plaisir de voir que ceux qui m’accompagnent sont fiers de moi. »
INSPIRER ET ENCOURAGER
Notre père de famille est non seulement un champion accompli, mais également un Polynésien fier de sa culture et de ses racines.
« Quand je représente Tahiti et la Polynésie française à l’étranger, je me donne à fond. Tout peut arriver. Et lorsque je remporte une victoire, c’est beaucoup d’émotions. Faire retentir notre belle hymne lors des cérémonie de remise de médaille est une grande fierté. »
Il nous confie néanmoins que, parfois, sa condition lui fait défaut en société. Le rejet et l’incompréhension sont encore très présents dans nos communautés. C’est pourquoi Allgower use de sa position pour revendiquer ses valeurs, et influencer le changement.

« C’est difficile de se sentir accepté. Dans le monde du sport, on a une catégorie à part. On aimerait être inclus dans la compétition avec les autres athlètes. Heureusement, ça se fait de plus en plus. »
Son parcours atypique et sa résilience font de lui un modèle pour toute une génération.
« À toutes les personnes en situation de handicap, si c’est possible pour elles de pratiquer une activité sportive, il faut foncer. Il ne faut pas avoir honte, ne pas hésiter à se lancer. »
- Trouble résultant de la nutrition déficiente d’un tissu ou d’un organe. Toute anomalie du développement d’une cellule.

Rédactrice
©Photos : Cartouche Louise-Michèle et Allgower Marua’e pour Hommes de Polynésie