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Teiva Véronique-Gatata, la pirogue à voile pour se connecter aux éléments

Publié le 5 août 2024

Compétiteur, navigateur, Teiva Véronique-Gatata a sillonné les mers avant de revenir aux traditions et à la navigation ancestrale sur va’a tā’ie. Hommes de Polynésie vous embarque pour suivre le parcours et les enseignements de cet homme de la mer.

La révélation et le retour vers soi

Du plus loin qu’il se souvienne, Teiva Véronique-Gatata a entendu la mer.

« Quand j’étais bébé, mes parents me posaient sur le ponton et pendant des heures, je regardais la mer, les vagues. J’étais déjà un peu obnubilé par l’océan.
J’ai commencé la voile vers 5 ans au Yacht Club à Arue avec l’optimist. Mon père tenait le restaurant du club et je trainais beaucoup par là. À un moment donné, il a bien fallu me mettre sur un bateau !»

Il poursuit ainsi ses aventures dans le monde de la voile, obtient ses diplômes (Brevet d’état 1er degré, Diplôme d’Etat Supérieur de voile, Brevet de capitaine 200) et exerce diverses fonctions : compétiteur, moniteur, entraineur, skipper, conseiller technique à la fédération de voile, capitaine bénévole et professionnel. Teiva résume : « J’ai fait de tout ce qui touche à l’eau avec une voile. »

En 2015, il renoue avec la navigation traditionnelle :

«On m’a demandé de faire capitaine sur la grande pirogue à voile Fa΄afaite : j’ai eu une révélation ! Je savais déjà à peu près naviguer sur une pirogue à voile, mais quand on m’a fait découvrir l’histoire de nos ancêtres, les techniques de navigation avec les éléments, ça m’a fait un choc.

J’ai pu constater le manque de pirogues à voile dans nos eaux, ce qui a motivé la création de l’école de navigation. Depuis ce jour-là, ça m’a carrément touché et je me suis dit que j’allais apprendre à fond la navigation ancestrale et que j’allais l’enseigner. »

Le retour au va’a tā’ie

Transmettre les savoirs

Grâce à ses recherches et aux rencontres qu’il fait, Teiva s’instruit sur la navigation polynésienne et entend ensuite partager son savoir : 

« Aujourd’hui, il faut essayer de faciliter cet apprentissage en donnant des cours de navigation au grand public, parce que les livres, c’est encore assez technique…
Alors, ce qu’on essaie dans notre école, c‘est partager de façon interactive. On crée des liens avec les gens pour les sensibiliser à utiliser les éléments pour naviguer. Ils peuvent ainsi renouer avec leur histoire, celle de leurs ancêtres arrivés en Polynésie grâce à la navigation et aux pirogues à voile. »

En 2019, le marin monte son école de navigation traditionnelle à Arue. Il intervient auprès des scolaires de Tahiti et Moorea. Il travaille aussi avec les associations de quartier pendant les vacances scolaires, dispense des master classes pour adultes, et enseigne même à l’Université, à l’IJSPF (Institut de la Jeunesse et des Sports) et au Centre des métiers de la mer.

Cette année, Teiva travaille avec la direction de la jeunesse et du sport pour créer le BPPES[1] mention pirogue à voile afin de former et diplômer de futurs moniteurs ou capitaines de pirogues à voiles.

Se connecter aux éléments

Après de nombreuses années de régates, Teiva a dû revenir à une autre méthode d’appréhension de la nature. En effet, la navigation moderne implique de lire les éléments pour obtenir vitesse et performance alors que dans la navigation ancestrale, se connecter aux éléments permet avant tout de trouver son chemin vers les autres îles.
Sans outil, sans moteur, le navigateur, sur son embarcation à voile, doit ouvrir les yeux et apprendre à s’intéresser à ce qui l’entoure : vagues, vent, houle, courant, soleil, étoiles…

« Dans la lecture des éléments, ce qui est le plus mystérieux et demande le plus de mémoire et de connaissance, c’est la navigation aux étoiles… Il faut maitriser des dizaines d’étoiles et de constellations, connaitre leur position dans le ciel, à l’horizon, savoir à quelle période de l’année elles vont se déplacer, être visibles, avec quelles étoiles elles sont reliées pour savoir où on est et où aller, à n’importe quel moment de la nuit ou du voyage. »

"Maitriser des dizaines d'étoiles et de constellations."

Cette connexion avec l’environnement permet également de redéfinir le temps.

« Retourner à la navigation ancestrale à l’heure de la vitesse et des moteurs, c’est compliqué. On est tout le temps pressé, mais il faut s’arrêter et tenter de redéfinir le temps.
Le
va΄a permet de voyager, mais il est hors du temps : par exemple, quand on va dans les iles, on ne peut pas se dire : « je veux arriver à midi pile ». Ce sont les éléments qui vous nous dire quand on va arriver. Il faut lâcher prise, et la navigation traditionnelle est une bonne école pour apprendre cela. »

Enfin, impossible de passer à côté de l’engagement écologique que représente le retour à la navigation à voile :

« On pense aujourd’hui que c’est très difficile mais on est capable d’utiliser des moyens pour ne pas polluer, et on peut même sensibiliser les gens à respecter la nature. Forcément, quand tu as appris à écouter, à être en symbiose avec elle, tu la respectes.
C’est ça le message qu’on veut faire passer : la connexion à la nature pour mieux respecter ces éléments. »

L'homme et la mer.

[1]Brevet Professionel Polynésien d’Educateur Sportif.

Marie Lecrosnier–Wittkowsky

Rédactrice

©Photos : Marie Lecrosnier–Wittkowsky pour Hommes de Polynésie et Moana Explorer

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