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Art & Culture

ÉRIC GRESSET : L’ART SUR TOILES, SUR MATIÈRES NATURELLES, ET SUR PEAU

Publié le 7 mars 2024

Impressionné, Hommes de Polynésie entre dans la maison d’Éric Gresset. Tout n’est qu’œuvre d’art : les tapisseries, les murs, les rideaux, le plafond, la table, sous la table, les malles, à l’intérieur des malles ; ici et là surgissent des toiles, des velours et tissus peints, des bijoux artisanaux, des sculptures sur les supports les plus divers ; tout foisonne d’imagination et de créativité, jusqu’à l’artiste lui-même : Éric Gresset est tatoué de la tête aux pieds. Rencontre avec un artiste accompli, à la fois sculpteur, graveur, peintre et tatoueur.

LE CHOIX D’UNE VIE À L’ÉCART

On dirait l’antre d’un musée, posé dans une servitude côté montagne de la côte nord. Un lieu en trompe-l’œil.

« On ne dirait pas depuis l’extérieur tous les trésors qu’il y a à l’intérieur. »

Un peu comme le personnage. Ce n’est qu’en approchant Éric qu’il se dévoile. Un homme paradoxal, à la fois secret, et pourtant connu.

« Moins on me voit, mieux je vis. Mon art est partout, sans que les autres ne sachent réellement d’où il provient. »

Éric côtoie de nombreuses personnalités locales et internationales. Il tatoue des inconnus comme des  célébrités. Ses créations trônent dans les salons de lieux improbables, ici, mais aussi loin, très loin de Polynésie.

D’où lui viennent ses inspirations ? D’un peu partout, sûrement. Né à Tahiti d’un père militaire français (ch’ti) et d’une mère polynésienne (des Australes), Éric se sent fier de vivre ses deux cultures. Une partie de sa vie se déroule en France, ainsi qu’en Allemagne à l’époque du mur de Berlin, et depuis 40 ans, il vit avec son épouse à Tahiti.

UN DON PEU COMMUN

Éric ne mâche pas ses mots. Il est tout à la fois admiré et redouté. Parce qu’il est vrai et entier… Alors ça passe ou ça casse.

« J’ai une aura personnelle très forte. J’ai un caractère qui surtout me permet de m’imposer. »

Bien avant, en France, il a été voyou, biker, et longtemps, il a travaillé dans le monde de la nuit. Il a aussi été métallier ajusteur, et entrepreneur. Mais le plus intrigant, c’est sûrement cet art qui lui est brusquement tombé dessus dès l’âge de 18 ans, alors que personne ne l’y avait initié, et qu’il n’y connaissait rien.

Ce don artistique, plus jamais il ne l’a lâché, ne cessant de se renouveler, touchant à tout. Il s’est fait tout seul.

« Je suis en permanence en train de dessiner, de peindre, de sculpter. Je suis un hyperactif de l’art. J’ai cette facilité de faire n’importe quoi, avec n’importe quelle matière pour un résultat toujours unique. J’utilise des matériaux nobles, inédits, que souvent je récupère, et avec rien, je fais quelque chose. »

Il travaille sur des bois précieux (tou, miro, marumaru, yaka, aito, santal blanc, teck), la pierre (dont la pierre fleurie très rare des Marquises), des rostres d’espadon, du velours, des vêtements, des planches de surf, des toiles… et des corps.

TATOUEUR PROFESSIONNEL

Car le métier d’Éric, c’est tatoueur. Pour lui, l’art polynésien est inégalable.

« Je choisis ma clientèle, je ne tatoue pas tout le monde ; il faut qu’il y ait un feeling, c’est essentiel. »

Son art est encré sur la peau de ses clients. Quarante ans de gens tatoués, soit des milliers de personnes, des kilomètres de surface de peau. Une gigantesque toile humaine.

« Je crée toujours librement, sauf en tatouage, car je dessine alors ce que le client dévoile de sa vie, qui est de l’ordre de l’intime. »

Ses dessins sur tissu ou papier sont comme des tatouages. Le motif de pehue, le tressage des Australes, est presque toujours présent dans ses créations. En 2014, il participe avec Mahinui Fashion Style au Shopping Festival de Cannes, et dessine des motifs polynésiens sur des jeans Levi Strauss. Il crée également les motifs des tenues de la Tahiti Fashion Week avec Tahiti Glamour en 2023.

« Je ne dessine jamais d’esquisse, je fais tout en free hand, j’ai un geste sûr, tout comme les mots de mes paroles. »

ART ABSTRAIT

« Transmettre c’est conserver… Oui, mais pas n’importe comment. Ici, on a un savoir, des idées ; il ne faut pas les dévoiler de manière inconsidérée : notre art est précieux. »

Le peintre expose rarement, et ne négocie jamais son art. Des toiles abstraites mêlées de surréalisme, au style local moderne et futuriste. Il prépare avec inventivité sa prochaine exposition, créant lui-même ses chevalets et ses encadrements.

À présent, l’artiste se sent à l’étroit. Dans sa maison, dans son pays. Il sent qu’il n’avance plus. Même s’il crée toujours profusément.

« J’approche de la soixantaine, j’ai envie de changer de vie, c’est maintenant ou jamais. C’est mon art qui guidera ma destinée. »

Doris Ramseyer

Rédactrice

©Photos : Doris Ramseyer pour Hommes de Polynésie

Pour plus de renseignements

Exposition de peinture au restaurant La Plancha Tahiti à Faa’a, vernissage le 8 mars 2024 dès 16h30

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