
Du tourisme à la haute couture, le créateur Moya-B bâtit son destin
Pour Hommes de Polynésie, le créateur Moya-B raconte son parcours hors du commun, entre l’Hexagone, Bora Bora et Tahiti, entre le monde de l’hôtellerie de luxe et de la haute couture, pour finalement nous délivrer, d’un regard bleu-vert empreint de sincérité, le secret du bonheur.
Un parcours entre deux mondes
« J’ai grandi entre Cherbourg et Tahiti. Militaire de carrière, mon papa a rencontré ma maman ici à l’époque du CEP. Mais de 6 à 18 ans, j’ai grandi en France, loin de la culture polynésienne… »
À 18 ans, celui que l’on appelle encore que Moe revient au fenua lorsque son père y est muté pour sa fin de carrière.
« J’avais fait des études d’art et de design, mais à l’époque, il n’y avait aucun débouché ici. »
Moe se tourne alors vers le rectorat, où on lui propose une solution : le Centre des métiers d’arts.
« Je ne voulais pas être sculpteur ou tatoueur… Ils ont vu que je parlais plusieurs langues et m’ont orienté vers l’hôtellerie. J’y ai travaillé pendant 17 ans ! »
L’hôtellerie et la découverte de soi
Anglais, allemand, arabe, japonais, espagnol, tahitien… Moe a toujours eu une passion pour les langues. Mais, à 25 ans, il ressent un profond besoin de changement.
« J’avais un goût non satisfait de la vie et de ce que je voulais faire. J’ai donc décidé de partir à Paris pour acquérir plus d’expérience, avoir un regard différent sur ma vie. »
Là-bas, il devient directeur de restauration, puis évolue vers l’organisation d’événements, toujours dans l’hôtellerie. Cependant, au fil du temps, il réalise que son véritable intérêt réside ailleurs.
« Petit à petit, je me suis rappelé que mon intérêt à la base, c’était de travailler dans le beau, dans le luxe, dans la mode. »
À 30 ans, il décide alors de revenir à Bora Bora où on lui propose un poste dans la restauration de tourisme de luxe.

Une rencontre déterminante
Il fait la connaissance de Dominique Pétras, une photographe polyvalente active dans différents domaines de l’événementiel, de la mode au cinéma.
« Elle a été la révélation, le chamboulement que je recherchais. Personnellement, j’ai besoin de beaucoup de travail pour ne pas m’ennuyer. Et elle aussi ! »
Lorsqu’un créateur se désiste juste avant un concours de beauté, Dominique lui lance un défi :
« Vas-y, toi, fais-le ! »
Sans hésiter, Moe se lance et réalise une tenue avec un corset inspiré des créations de Thierry Mugler et Jean-Paul Gaultier. À sa grande surprise, il remporte le concours.
« Là, je me suis dit : ‘finalement, je suis capable de faire quelque chose’. »
L’audace de créer
Cette victoire est suivie d’un nouveau challenge : Keven Hauta, figure reconnue de la danse à Bora Bora, lui demande de concevoir les costumes pour le Hura Tapairu.
« Le thème, c’était l’océan. J’ai eu une idée tout de suite : une tenue avec des pinces de crabe, ramassées sur la route. En fait, pour créer, il suffit de regarder. Parfois, l’inspiration est juste là, sous nos yeux. »
Lors du spectacle, le présentateur, impressionné par l’originalité des costumes, ne peut s’empêcher de le citer.
L’ascension dans le monde de la mode
En 2014, il revient à Tahiti prendre soin de ses parents âgés.
« On me connaissait déjà parce que j’organisais de nombreux événements. Et puis, en 2015, Alberto Vivian me propose de créer des tenues pour sa Tahiti Fashion Week. »
Moe décide de s’associer avec sa cousine, institutrice également couturière, qui participe aussi à l’événement. Ensemble, ils créent leur marque : l’anagramme de leur deux prénoms, Moe et Maya et l’initiale de leur famille, Bennett.

« C’est comme cela que ça a démarré… La Fashion Week a été un succès. Dès le lendemain, le téléphone n’a cessé de sonner pour des commandes ! »
Du fenua à Hollywood
Les opportunités s’enchaînent et Moya-B se voit proposer de créer des tenues pour des événements prestigieux : le mariage du fils de la princesse de Monaco, un défilé pour la 20th Century Fox et même une robe pour Sharon Stone qu’elle portera à l’occasion des Golden Globes.
« J’étais comme un fou. Je me suis dit : c’est super ce métier ! »
En 2016, il habille Hinarere Taputu, Miss Tahiti, en lice pour Miss Monde. Dans une interview internationale, la jeune femme mentionne :
« J’ai choisi ce créateur parce qu’il vient de mon pays. »

Un an plus tard, il s’attaque à la création du passage « tenue de soirée » de toutes les candidates à l’élection Miss Nouvelle-Calédonie.
Les commandes continuent d’affluer : en 2018, Air Tahiti Nui souhaite relooker les costumes de son personnel. Il enchaîne avec des créations pour les élections de Miss et Mister Tahiti…



Le secret du bonheur
« À chaque aventure, on apprend quelque chose. Des failles, des nouvelles techniques… »
Mais ce qui motive avant tout Moya-B, c’est de rester fidèle à lui-même avec, en 2025, de nouveaux projets et comme une folle envie de fouler une nouvelle fois les podiums.
« Côté travail, je n’aime pas le rébarbatif. J’ai choisi de m’amuser. Si j’ai un message à faire passer, c’est celui-ci : faites des choses qui vous plaisent, c’est important. Être heureux, c’est un secret de longévité. Et le bonheur existe en chacun de nous. »
