Tuehu : L’homme et le vélo pour l’éco-course
Qu’il vente ou qu’il pleuve, Tuehu collecte et livre les impératifs quotidiens. Ici, pas de voiture, juste un homme, un vélo. Hommes de Polynésie l’interpelle l’instant d’une pause entre deux livraisons pour comprendre ce qui motive Tuehu, coursier à vélo/éco-entrepreneur avec Manacycle Express.
D’employé à patron
Après des études de cuisine à Bordeaux, Tuehu décide de revenir au fenua en 2009 avec sa femme et leur fille aînée âgée de 5 mois. Il travaille à l’Intercontinental, au Radisson et au Velvet, mais depuis peu père de famille, il n’y trouve pas son compte.
« Je travaillais tôt le matin et tard le soir, je ne voyais plus mes enfants. Au bout de quelque temps, je me suis dit que ce n’était pas une vie pour moi. J’ai cherché d’autres issues. »
Un beau matin , en consultant les annonces de la SEFI, Tuehu intrigué répond à une offre d’emploi.
« J’ai appelé le patron à 9h, et à 12h j’avais le job. J’étais devenu coursier. »
Tuehu connaît l’ardeur au travail, car jeune, il travaillait dans les fa’a’apu familiaux de Huahine. Maintenant coursier, et s’étant fait remarquer pour sa persévérance au niveau professionnel, avec plus de 5 ans d’expérience, le gérant de Manacycle Express lui demande l’improbable.
« Il m’a demandé de reprendre l’affaire. Impensable, j’étais bouche bée ! »
Bien qu’il n’ait pas tout de suite été enthousiaste à l’idée de reprendre l’entreprise, le natif de Huahine prend son courage à deux mains et se lance dans l’aventure.
« Je ne pensais pas y arriver. Tout me semblait tellement compliqué. Puis au fil des discussions, le patron m’a convaincu. J’ai racheté l’entreprise . »
Trace ton chemin
Le métier, Tuehu le connaît bien, mais mis à part l’activité de coursier, le jeune patron se doit d’apprendre les bases de l’entrepreneuriat.
« J’ai tout appris sur le tas. Les impératifs d’entreprises, la comptabilité et le management. »
Carnet à la main, Tuehu découvre peu à peu ce que l’entreprenariat implique, pour le meilleur comme pour le pire. Les choses se compliquent, car la crise sanitaire bat son plein.
« J’ai dû quasiment tout recommencer, revenir à zéro. Le business a pris un coup. »
Rien ne l’abat, sans hésiter, Tuehu avance. Au fil du temps, avec les clients satisfaits comme la TEP, le carnet se remplit et les journées de notre chef d’entreprise s’allongent.
« Je préfère dire oui à un client, si je suis sûr de pouvoir assurer mon service. À vélo, tout peut se compliquer. Pour moi la confiance des clients, c’est le plus important. Car je participe indirectement au bon déroulement de leur activité. »
Et pour Ella Camart de la TEP :
« Tuehu répond parfaitement à notre politique RSE1, en proposant un service en phase avec les 3 piliers du développement durable, soit l’économie, le social et l’environnement. »
Suivre sa voie
Les journée types de Tuehu sont animées : réveil à 7h, café et c’est parti. À l’aide de son vélo électrique, il prend la route de Punaauia, fait quelques stops au passage, selon les clients, et se rend en ville, ou la journée commence réellement.
« Tout est question d’itinéraire. Il faut beaucoup d’organisation, car un aller-retour entre Pirae et l’aéroport doit se faire stratégiquement. »
Sensible à la problématique environnementale, Tuehu a opté pour le vélo électrique. Mais vouloir à tout prix réduire son empreinte carbone n’est pas de tout repos.
« Mes journées me fatiguent, mais je sais qu’avec le vélo, je fais de l’exercice et je participe au changement de mœurs. De plus, je pense livrer plus rapidement dans certains cas (rires). »
Humble et pragmatique, Tuehu avoue ne pas forcément se voir comme un activiste de la cause environnementale. L’éco-entrepreneur, voit sa pratique comme une habitude qui devrait se généraliser, un impératif pour le futur.
« Pour moi, le vélo est avant tout un choix pragmatique, en ce qui est de l’empreinte carbone, j’estime que c’est un facteur tout aussi important et qu’il est normal que plus d’entrepreneurs s’y mettent. »
Dans les rues de Papeete, avec son vélo, Tuehu n’est pas prêt d’arrêter son activité. Il se sent libre et malgré les aléas de son activité, il souhaite à toute la jeunesse de trouver sa voie.
« À vélo, à pied, seul ou entouré, le plus important, c’est de faire les choses pour nous, et comme on les entend. Être libre. »
¹ La responsabilité sociétale des entreprises désigne la prise en compte par les entreprises, sur base volontaire, et parfois juridique, des enjeux environnementaux, sociaux, économiques et éthiques dans leurs activités.
Niuhiti Gerbier
Rédacteur
© Photos : Niuhiti Gerbier et Ella Camart pour Hommes de Polynésie
pour plus de renseignements
Portrait mis en avant par la TEP