Rencontre avec Raimana Li Fung Kuee, Capitaine des Tiki Toa (1/2)
On ne présente plus les Tiki Toa. D’eux on dit beaucoup de choses : qu’ils sont l’âme sportive du Fenua1, qu’ils sont des modèles pour la jeune génération et qu’ils font briller l’étoile du beach soccer polynésien sur la scène internationale. Chacun des membres qui compose cette équipe a bien évidemment un caractère différent mais ils ont tous en commun d’avoir à cœur de défendre les valeurs de l’âme polynésienne. Leurs performances sportives ont soulevé des élans de joie à Toa’ta et dans chaque foyer du territoire. Pourtant, si l’on connaît le parcours sportif des Tiki Toa, on ne connaît pas nécessairement bien les personnalités de ces joueurs. Aujourd’hui, Hommes de Polynésie a l’honneur de vous présenter un portrait intime du Capitaine de cette merveilleuse équipe, Raimana Li Fung Kuee.
Une passion née en famille
Raimana est né le 10 avril 1985 à Tahiti d’un papa d’origine chinoise et d’une maman tahitienne de l’île vanille Taha’a. Aussi à l’aise en football à 11 qu’en beach soccer, il a d’abord été recruté très jeune par le centre de Formation du FC Nantes et a évolué à l’AS Dragon puis à l’AS Pirae, participant même à la Ligue des Champions de l’OFC avec les deux clubs. Il est même élu meilleur buteur du championnat 2013-2014.
Le beach soccer lui réussit tout autant : ballon de bronze en 2013, deux fois vice champion du monde, il est considéré comme un des meilleurs joueur actuels au monde de la discipline. À juste titre, il a même été décoré de l’ordre Tahiti Nui par le Président du Pays.
Malgré ce parcours impressionnant, Raimana reste plutôt discret dans les médias et sur sa vie personnelle. Une attitude exemplaire qui a suscité la curiosité d’Hommes de Polynésie.
Rencontré non loin de son lieu de travail, l’établissement pénitentiaire de Faa’a, je trouve un homme souriant et affable.
Raimana m’explique qu’il vient d’une famille où tout le monde est sportif. Son père et son frère jouaient beaucoup au football, sa mère pratiquait l’athlétisme et sa sœur le basket. Ses frères et sœurs étant plus âgés que lui, Raimana a suivi les compétitions avec eux et est allé voir les matchs de son frère.
-
- © photo : TNTV
-
- Raimana en famille
Très vite, il a aimé le football. Petit dernier de la famille, il était un peu seul et ce côté collectif lui a plu ainsi que la camaraderie que ce sport fait naître.
Aujourd’hui encore ses meilleurs amis sont parmi ses coéquipiers.
Raimana m’explique néanmoins que les débuts n’ont pas été des plus faciles :
« Le fait que j’étais asthmatique n’a pas facilité les choses mais heureusement cet asthme est passé définitivement lors de mon premier séjour en métropole sans doute grâce au climat moins humide. »
Heureusement pour le beach soccer et la Polynésie, Raimana a persévéré.
Soutenu par des parents bienveillants mais néanmoins exigeants, Raimana a, dès le jeune âge de 14 ans, été recruté par le centre de Centre de Formation de Nantes. Il a ainsi dû quitter le foyer familial et le Fenua pour la métropole.
« Lorsque nous étions petits mes parents nous cadraient beaucoup et par exemple nous devions faire nos travaux à la maison comme le ramassage des feuilles. Nous devions être sérieux mais cela a porté ses fruits aujourd’hui. »
Par la suite il a passé un baccalauréat comptabilité et gestion même si, dans le centre de Formation, l’accent était surtout mis sur le sport et moins sur les études. Il me raconte que son coach, ayant remarqué qu’il était fatigué, lui a demandé de faire un choix, et Raimana s’est alors concentré sur sa carrière sportive. Pour autant, conscient qu’une telle carrière n’avait qu’un temps, Raimana n’a jamais négligé le travail.
Un homme ancré dans le réel
Pour ce sportif accompli le sport ne doit pas faire oublier de garder les pieds sur terre et pour cela Raimana n’a pas hésité à se lancer dans une vie professionnelle active.
« J’ai travaillé dans une banque comme guichetier avant de passer le concours de surveillant pénitentiaire en 2015, concours que j’ai réussi. »
Je l’interroge alors sur le choix de ce concours difficile.
Raimana m’explique alors que son frère est douanier et éprouve une grande fierté à travailler pour l’administration et à porter l’uniforme. L’identification à ce grand frère a tout naturellement amené Raimana à souhaiter entrer dans l’administration
Cette fierté est aussi celle de ses parents dont tous les enfants ont aujourd’hui une bonne situation professionnelle, sa sœur étant quant à elle cadre chez Vini.
« Ainsi aujourd’hui je peux rendre à ma famille et particulièrement à mes parents ce qu’ils m’ont donné. »
Après avoir réussi le concours, Raimana est parti pour une formation de 10 mois en France au cours de laquelle il a effectué ses stages à Oermingen, Metz, Strasbourg et Nantes.
Je demande alors à Raimana si l’éloignement de sa famille et de ses amis n’a pas été trop difficile :
« Non car je suis habitué dans la mesure ou je suis parti à 14-15 ans en Centre de Formation en France. Bien sûr pour la famille c est toujours difficile surtout pour ma maman mais ils me soutiennent. Aujourd’hui je suis revenu et j’habite à Pirae à côté de chez mes parents. »
Au sein des Tiki Toa, Raimana n’est bien évidemment pas le seul à consentir à de tels efforts.
Cependant, rien n’est vécu comme un sacrifice puisqu’il s’agit simplement de faire ce qui est nécessaire pour atteindre le but de tous : mener l’équipe à la victoire. Et quand on voit l’élan suscité par cette équipe, nul ne s’en plaindrait en Polynésie !
1 Pays.
Nelly Hemain
Rédactrice web
© Photos de couverture : Nelly Hemain
© Photos : Raimana Li Fung Kuee
