Valoriser le tri des déchets avec Tihoti
« Arue, une ville où il fait bon vivre ». Tortue d’or pour la 11ème fois consécutive, la ville d’Arue, reine en matière de tri des déchets, peut être fière de son palmarès. Mais derrière ces strass et ces paillettes, se cachent des hommes et des femmes qui travaillent sur le terrain, et qui, à force de volonté et de persévérance, réussissent à nous sensibiliser à l’importance du tri. Parmi eux, Tihoti Ligthart, directeur technique de la commune d’Arue, qui depuis 2013, en a fait une de ses priorités. Hommes de Polynésie l’a rencontré.
Une période d'apprentissages variés
Tihoti est né à Papeete il y a 38 ans d’une mère originaire des Iles sous le vent et d’un père originaire de Tahiti. Il fait ses études à Taaone et intègre la filière bâtiment. Très vite, il a envie de réussir pour avoir un emploi stable. Il travaille en tant que conducteur de travaux, puis comme enseignant pendant une année pour remplacer des instituteurs en formation. Ce poste l’amène à beaucoup se déplacer dans les îles, notamment aux Marquises, aux Iles sous le vent, aux Australes et aux Tuamotu. Mais l’envie de revenir dans son domaine, le bâtiment, est plus forte.
« J’ai été conducteur de travaux pour une société privée, travaillé pendant 3 ans dans un bureau d’études pour la réalisation de plans chez Valutech, chef d’atelier charpente à la SMPP SOGEBA, affecté au CHT du Taaone. »
Il y a 11 ans, un concours est organisé par la commune d’Arue. Il y rentre en tant que technicien dans le domaine du bâtiment et passe ensuite adjoint au chef du service Technique. En 2013, il prend la direction des services techniques.
Le travail technique au sein de la commune d'Arue
Les services techniques sont organisés en département et cellules.
- Le département environnement qui compte le plus grand nombre d’agent s’occupe du ramassage des ordures ménagères et des différents déchets ainsi que du nettoyage des accotements et différentes installations communales.
- Le département mécanique intervient sur les réparations d’engins et de véhicules.
- La cellule bâtiment s’occupe de l’entretien, la rénovation, la réfection des bâtiments ainsi que la réalisation d’ouvrages.
- La cellule hydraulique s’occupe des travaux hydrauliques, du remplacement de canalisation ou la pose de nouveau réseau.
- La cellule menuiserie effectue des travaux de menuiserie dans les bâtiments appartenant à la commune et notamment dans les écoles.
- La cellule transport s’occupe du transport des enfants des écoles.
Tihoti est secondé dans ses tâches d’organisation et de gestion par un secrétariat.
« Les travaux sont très diversifiés, on ne s’ennuie pas, chez nous on fait tout. Gros œuvre, plomberie, etc… menuiserie. On a une très bonne gestion et on organise en fin d’année les prévisions pour l’année à venir. »
Finalement, Tihoti affirme qu’il faut être assez touche à tout et polyvalent. L’environnement et l’hydraulique, il les a découvert à travers son poste.
« Cela fait 11 ans que l’on a la tortue d’or. Quand il y a des conflits, et il y en a comme partout où l’on gère des humains, je règle ça tout de suite pour éviter que ça s’envenime. »
Communiquer pour faire un geste pour notre planète
« Si tout le monde participe au tri, ça coûtera moins cher à la collectivité. Actuellement c’est la commune qui paye 50% du coût, 25% l’administré et 25% le Pays. »
Père de deux enfants, il reconnaît que les écoles font du bon travail en matière de sensibilisation au tri des déchets. Mais quand il reçoit de la famille, il se rend compte parfois que tous les déchets sont allés dans le bac gris.
« Pour comprendre, c’est pas évident, c’est pas automatique. »
La communication est primordiale, que ce soit au sein de sa propre famille ou pas. Tihoti et son équipe se rendent sur le terrain dans les quartiers qui ont du mal à trier correctement pour expliquer la nécessité de faire ces gestes éco-citoyens. Lorsque le tri n’est pas fait ou mal fait, la collecte n’est plus assurée.
« On va vérifier sur place si c’est trié ou pas. Les gars sont bien formés, bien carrés. En cas de dépôt sauvage, quand les déchets sont mélangés, on ne ramasse pas. On essaye ensuite d’identifier les auteurs du dépôt.»
Pour Tihoti, il y a beaucoup de choses à mettre en place, notamment au niveau des déchets électroniques qui posent des difficultés en termes de ramassage et de stockage. Il est demandé aujourd’hui aux administrés de déposer ce type de déchet à Fenua ma.
« Il faudrait peut être que la société qui vend une télévision garde 5 000 F de caution. Le chèque de caution inciterait l’acheteur à ramener la télévision chez le commerçant qui ensuite, s’occuperait de la déposer chez Fenua ma… Celui qui a produit les déchets doit les faire évacuer. Il faut bien trouver un système ! »
Au niveau des communes, il souhaite que plus d’entre elles jouent le jeu du tri des déchets car elles y gagneraient et feraient beaucoup d’économies.
« Si la commune est un moteur, c’est bien au niveau de la population. »
Une distinction entre encombrants est arrivée en 2013. Les déchets de catégorie 2 comme le bois sont aujourd’hui facturés 17 500 F la tonne et ceux de catégorie 3, comme la ferraille, 10 000 F la tonne.
« Inciter la population à différencier, à faire le tri au niveau des encombrants peut entraîner de sacrées économies. »
Il y a un siècle de cela, le problème du tri des déchets n’était en aucun cas comparable à celui auquel nous devons faire face aujourd’hui en Polynésie, puisque quasi inexistant. L’état d’esprit d’une vie au jour le jour des polynésiens n’avait alors pas de conséquences dramatiques sur son environnement.
Mais les temps ont changé. Dans l’ère de la société de consommation actuelle, on produit de plus en plus, consomme de plus en plus, pollue de plus en plus. Est-ce bien ? Est-ce mal ? Une avancée ? Un recul ? Cela nous rend-il vraiment heureux ? Oui ? Non ? Parfois ? Souvent ? A chacun sa vision des choses.
Quoiqu’il en soit, l’urgence environnementale et de santé nous amène à penser aux autres, à notre terre, et à changer nos façons de faire. Certains diminuent la quantité de déchets produits en réduisant leurs achats, en limitant les emballages des produits achetés. D’autres trient. D’autres n’y font pas vraiment attention.
À l’instar de Tihoti et du département environnement de la commune d’Arue, plutôt que mal juger ceux qui n’ont pas encore pris l’habitude de trier, pourquoi ne pas privilégier la communication bienveillante ? Elle donne de merveilleux résultats!
Plus d'informations
Sur la page Facebook Arue, une ville où il fait bon vivre
Tehina de la Motte
Rédactrice web
© Photos : Hommes de Polynésie