Retour sur la genèse du mouvement « Made in Fenua » avec Gaël
Gaël Lamisse, chef d’entreprise de la société polynésienne Tikitea, revient sur les origines du label « made in Fenua ». Aujourd’hui, le mouvement du « consommer local » est devenu central dans les achats des consommateurs polynésiens. Pour Hommes de Polynésie, Gaël nous livre les secrets de la recette du « made in Fenua » qui bénéficie à tout le tissu économique polynésien.
Gaël, « piqué au tiare » depuis presque 20 ans
Arrivé au Fenua sur un voilier en 2000 après avoir traversé les Océans Atlantique et Pacifique, Gaël est rentré comme assistant de production dans la société de produits d’hygiène Tikitea. Progressivement, il gravit les échelons de la société avant d’en prendre les rênes en 2016 en tant que directeur général.
« Tikitea emploie plus de 60 personnes, et comme d’autres sociétés du secteur industriel, les gens ne soupçonnent même pas la quantité de produits que nous faisons « made in Fenua ». Avant, il fallait presque s’en cacher, ce n’était pas un gage de qualité dans la tête des consommateurs. On faisait des produits à consonance américaine pour donner l’impression qu’ils venaient des Etats-Unis ! »
Désormais, les choses ont bien changé. Gaël perçoit rapidement tout le potentiel du « made in Fenua » et s’active au sein du Syndicat Industriels de Polynésie Française, SIPOF, afin de développer le « consommer local » et sa communication.
« Nous avons compris qu’il était important de faire comprendre que consommer local équivalait à protéger nos emplois. Les jeunes générations sont beaucoup plus sensibles que leurs aînés à cette dimension. »
A voir Gaël arpenter les travées de ses ateliers de production où il salue par leur prénom chaque employé, on sent un chef d’entreprise proche de ses employés et dévoué pour son entreprise.
« Je ne me vois plus partir de Polynésie, j’ai à cœur de développer Tikitea dans les années à venir, on peut dire que je suis « piqué au tiaré » ! »
Le « Made in Fenua », une success-story polynésienne
Le syndicat de Gaël, le SIPOF, est actif depuis longtemps afin de mettre en valeur les produits du Fenua et le savoir-faire local. Dans les années 90, le logo « j’achète local » avait été créé, puis dans les années 2000 le label « produit en Polynésie ». A la fin des années 2000, c’est une étude du cabinet Earth dirigée alors par Paul-Roger de Willers qui définit clairement la volonté de communiquer sur l’origine locale, et donne une nouvelle ampleur au « consommer local ».
« Afin de contrecarrer les critiques récurrentes contre l’agriculture et l’industrie locale, nous avons mis sur pied le « made in Fenua » accompagné par une agence de communication. Initialement, ce slogan appartenait à une association étudiante « O’clock » qui visait à promouvoir l’artisanat local lors de salon en 2006. Mais, pour la petite histoire, devant l’INPI, ils avaient déposé « Made in Fenna » et non « Made in Fenua ». Nous avons repris le flambeau ! »
Le SIPOF dépose alors le slogan, mais aussi la « baseline » connue « nos produits sont nos emplois » ainsi que le logo que tout le monde connaît. Gaël insiste sur les efforts qui sont menés afin de rédiger des chartes pour élargir le concept du « made in Fenua » vers les artisans ou les entreprises liées au secteur tertiaire (services, numériques, etc.).
« Nous avons décidé de jouer collectif en faisant profiter aux mondes agricole et artisanal le logo « made in Fenua » afin de faire front commun. Aussi, nous tenons chaque année à payer notre stand lors de l’événement organisé par la CCISM lors du salon « made in Fenua ». C’est toute l’économie qui doit profiter du label, pas seulement les industriels. »
Afin d’éviter toute fraude, Gaël n’hésite pas à prôner la manière forte, notamment dans l’artisanat, qui est un secteur plus difficile à réguler que celui industriel qui dispose d’une comptabilité analytique plus rigoureuse.
« Les chartes servent à cela. Il faut faire respecter les règles du jeu, pas question de faire passer du « made in China » pour du « made in Fenua ». Une seule solution pour éviter cela, c’est la délation. »
Même s’il est difficile de quantifier les retombées positives du « made in Fenua » sur les chiffres d’affaire des entreprises du Fenua, Gaël estime que le label fonctionne parfaitement afin de battre en brèche les critiques récurrentes visant l’agriculture et l’industrie polynésiennes.
« Avant, on parlait beaucoup des pesticides utilisés par le secteur agricole local, alors qu’on en utilise bien moins que nos voisins du Pacifique comme la Nouvelle-Zélande ou les Etats-Unis. Concernant l’industrie, on était souvent pointé du doigt pour entretenir la vie chère via la TDL (taxe de développement local). Aujourd’hui, grâce au « made in Fenua », le consommateur pense avant tout à consommer local et par là-même à protéger les emplois locaux. C’est une grande réussite ! »
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Sur la page Facebook Made in Fenua
G. C.
Rédacteur web
© Photos : G. C., Gaël Lamisse, Made in Fenua