Dylan Tiarii a deux rêves : le droit et le théâtre
C’est dans une jolie maison polynésienne, à son image, que Dylan Tiarii reçoit Hommes de Polynésie. C’est ici qu’il passe la plupart de son temps, pour se consacrer aux répétitions avec son metteur en scène. Difficile de résister au charme de ce jeune homme, qu’on associe au rôle de Haere Po, un soldat sans âge et maître du temps dans Tu’ai1, dont il est également le ‘orero2. Mais pour l’heure, c’est son histoire qu’il nous narre…
Acte 1 scène 1
Le 21 septembre 1998, à Paofai, on guide un bébé vers lumière grâce à des instruments en forme de pince.
« J’ai encore les marques, ça m’a un peu compressé le cerveau je crois ! (rires)»
Dylan Tiarii fait ses premiers pas sur l’île sœur de Tahiti, où il grandit avec ses parents.
« Ma mère est originaire de Moorea, et mon père de Raivavae, où je rêve d’aller. »
Au collège, le jeune homme sait ce qu’il veut faire : du droit.
« J’avais vu un reportage sur le métier de juge. Ça m’a beaucoup intéressé, et je me suis dit qu’il n’y avait pas de juge polynésien qui exerce ici, alors pourquoi ne pas essayer ? »
Si Dylan choisit ce métier, c’est qu’il souhaite s’imposer avec impartialité. Pour lui, il faut connaître la culture polynésienne pour comprendre la manière de penser et d’être du maohi.
« Le métropolitain ne connaît pas forcément les tenants et aboutissants de la tombée des jeunes Polynésiens dans l’alcool ou la drogue.»
Dylan est déterminé, mais manque d’assurance. Au lycée, il choisit l’option théâtre…
Intrigue
Il intègre le théâtre en 1ère sur les conseils de sa mère.
« Elle m’avait un peu forcé en disant que grâce à cela, j’apprendrais à mieux m’exprimer en public – ce qui est important pour le métier de juge. »
Timide, une rencontre l’aidera à se décider. Sur le banc de l’école, il est assis à côté de Manutea Matthieu, qui deviendra son meilleur ami.
« Nous étions assis l’un à côté de l’autre et nous nous sommes mis à discuter :
– « J’aimerais bien faire du théâtre. Mais j’ai honte… »
– » Hey ça tombe bien ! Je suis le seul garçon en théâtre. Il n’y a que des filles. Allez viens, on y va ensemble ! » »
Nœud
« Au premier cours nous avons fait des exercices de relaxation. C’était tellement apaisant que je me suis endormi ! »
L’acteur en herbe démarre à son rythme. La confiance viendra petit à petit.
« J’étais tellement mauvais, que lors du spectacle de fin d’année au lycée, on m’a donné le rôle du précepteur : je devais juste rester debout et m’incliner à chaque fois qu’un personnage passait. »
Mais le théâtre lui plaît. Dylan persévère et apprend à s’affirmer, grâce aux exercices d’improvisation.
« On nous impose un thème et un cadre, puis on invente un personnage et une histoire avec d’autres élèves. J’étais complètement perdu. Le ‘ça fait honte’, je connais très bien. Je ne parlais pas fort, je bafouillais et disais des choses incompréhensibles. Ça a duré toute ma première année, et a fini par se débloquer l’année suivante. »
Notre jeune Polynésien se souvient de sa première scène et de la confrontation au public, dont il craignait énormément les critiques.
« J’ai craqué et pleuré juste avant de monter sur scène. Mais je l’ai fait, et j’étais très fier de moi. »
À la fin du spectacle, aux remerciements, c’est un public conquis qui se lève pour applaudir. Un sentiment de satisfaction prend Dylan, qui se dit au même moment :
« Je veux revivre ça. »
Dénouement
Du haut de ses 22 ans, Dylan Tiarii est confiant et plein d’enthousiasme communicatif. Il multiplie ses apparitions dans le monde du théâtre et découvre des rôles et des textes auquel il prend goût.
« Ça va faire six ans que je suis dans le théâtre maintenant. J’ai intégré la compagnie To’u fenua e motu3 il y a quatre ans et j’ai pris plaisir à jouer sur différents sites, tels que le petit théâtre, le Musée de Tahiti et ses îles ou encore à Huahine. »
Quant au droit, il n’abandonne pas, bien au contraire ! Il entame sa première année de master à l’UPF, et a pour projet de poursuivre en France.
To’u fenua e motu prépare actuellement trois nouvelles créations dont Tu’ai. Seul problème : ils n’ont pas de lieu.
« Je rêve de jouer au grand théâtre de la Maison de la Culture ! Nous sommes une petite compagnie composée de jeunes acteurs polynésiens, et nous souhaitons partager notre passion avec tout le monde. Comment faire ? »
Vainui Moreno
Rédactrice web
© Photos : Vainui Moreno, Monak, Vanessa Cuneo