[2/2] Tuiterai Salmon, plonger dans le monde des requins
Entre la terre et la mer, Tuiterai Salmon a fait un choix à sa sortie du lycée. À 22 ans aujourd’hui, il poursuit un master de recherches sur les juvéniles de requin et participe au suivi lagonaire de Moorea. Hommes de Polynésie est allé à sa rencontre.
Faire partie de la mer pour étudier
Par cette formation, Tuiterai voulait aller plus loin et s’approcher le plus possible des conditions idéales pour étudier le monde marin.
« Le recycleur, c’est comme une boucle. T’as ce qu’on appelle une « unité » dans le dos qui va recycler ton air. Tu aspires ton air et tu l’expires dans l’autre moitié de la boucle. Le CO2 va être enlevé de ton air et tu peux le re-respirer. »
Ce qui lui permet de rester beaucoup plus longtemps sous l’eau. Que ce soit pour le master, la recherche comme l’analyse comportementale de la méga faune, ou encore par loisir, il cherche avant tout à optimiser ses conditions.
« L’exemple que je pourrais donner c’est en circuit ouvert ; quand tu prends ton bloc, t’as juste un embout et tu fais des bulles, t’es un peu comme un touriste sous l’eau. Alors qu’avec un recycleur, t’as vraiment l’impression de faire partie de la faune et tu peux t’approcher très près d’eux. Comme si t’étais un poisson. »
Outre l’expérience et les formations, il entretient son corps à travers la callisthénie, la musculation au poids du corps.
« Ça aussi, ça demande beaucoup de discipline. Même la personne la plus déterminée aura forcément des jours ou des semaines où elle n’aura pas la motivation mais il faut quand même se lever et y aller. Même quand il pleut, même quand c’est la tempête. Ça fait 3 ans que j’en fais. »
Tuiterai doit néanmoins faire très attention avec la pratique du sport. La plongée et le sport, notamment la musculation, n’étant pas compatibles.
« Faut savoir que quand tu fais une plongée, tu respires du gaz sous pression et notre air il est composé à 80% à peu près de diazote. Quand tu fais des longues plongées, ton corps sature en azote parce qu’il est comprimé et il y en a beaucoup dans l’air que tu respires. Ça te créé des espèces de petites bulles dans le corps et faut donner le temps à ton corps de « désaturer », c’est-à-dire d’évacuer naturellement l’azote. […] Pendant que tu désatures, ça peut durer des heures après la plongée, faut pas t’entraîner. Ça peut causer un accident de décompression qui est très grave. »
Comme si son corps n’acceptait pas d’être éloigné de la mer. Comme s’il pleurait des gouttes d’azote avant de sécher ses larmes et reprendre le cours de sa vie.
L'importance de la détermination, la persévérance et la discipline
« Si t’as pas la détermination de commencer quelque chose et de le poursuivre, tu ne commenceras jamais. Si tu t’arrêtes au moindre échec, à la moindre erreur, tu n’avanceras jamais. C’est pour ça qu’il faut aussi de la persévérance. La discipline ça englobe un peu tout et ça t’aide dans tous les domaines. »
Chacun peut s’éduquer et faire en sorte de devenir la meilleure version de soi. La remise en question et la rétrospection étant les principaux moyens pour y parvenir selon lui.
« Un exercice, c’est de se remémorer la veille et revoir chaque moment et se dire : Qu’est-ce que j’aurais pu améliorer ? Ça t’aide à tous les niveaux de ta vie, notamment l’émotionnel. Quand on est soumis à ses émotions, on a du mal à y voir clair, à avancer, à rester productif. J’aime travailler dessus et ça me fait avancer dans ma vie. Ça rejoint la mentalité qu’il faut avoir en plongée ; être calme, se demander ce qu’on aurait pu mieux faire par rapport à la plongée précédente et être rigoureux. »
Cette force et cette volonté de poursuivre malgré tout, Tuiterai remercie son père pour lui avoir inculqué d’importantes valeurs. Le conseil qui lui a été donné tout au long de sa vie a été, de ne pas trop se poser de questions, de ne pas trop angoisser. Il faut foncer. Et surtout, ne pas faire les choses à moitié. Et Tuiterai s’évertue à la mettre en pratique chaque jour.
« Je vais faire un peu une généralité, en parlant du point de vue d’un jeune homme. Je pense que c’est important d’avoir une figure paternelle. Ça te donne un modèle masculin à suivre. Pas forcément un père, ça peut être un oncle, un grand-frère ou alors un ami. Ça te donne un objectif à atteindre. Vous ne ferez pas forcément les mêmes choses mais ça te donne un objectif moral à atteindre. Je pense que c’est très important parce que les gens performent mieux dans la vie en générale dès qu’ils se trouvent un objectif et une raison d’avancer. »
Rédacteur
©Photos : Manutea Garcia, GlemS et Tuiterai Salmon pour Hommes de Polynésie
Directeur des Publications : Yvon BARDES