Teata, tatoueur polynésien cosmopolite
Teata Vauche est un tatoueur polynésien passionné qui vient d’ouvrir un salon de tatouage à Paea, sa ville natale. L’idée de partager sa culture et d’autres cultures est omniprésente dans son discours : s’enrichir de la différence, faire évoluer, innover, aller de l’avant, en gardant ses racines… Tout un parcours pour cet artiste cosmopolite qu’Hommes de Polynésie vous invite à découvrir.
Le tatouage, une évidence
Baigné dans le monde de l’art avec un père artiste peintre et sculpteur, Teata s’intéresse au tatouage alors qu’il est encore au collège.
« Le tatouage me fascinait, par rapport au fait de s’ancrer quelque chose sur la peau, cela me posait beaucoup de questions. »
Au début des années 2000, Teata s’inscrit au Centre des Métiers d’Art, avec une formation de sculpture sur bois, pierre, nacre et os. Au bout de trois ans de formation, il fait un stage en entreprise, chez un tatoueur. À partir de là, il s’intéresse davantage au tatouage et souhaite se lancer à son compte. Mais suite au décès de son papa, Teata doit chercher du travail pour aider sa famille.
« J’ai trouvé du travail comme graveur sur nacre, ça a duré quatre ans. Au bout d’un an de travail, j’ai pu économiser pour m’acheter du matériel de tatouage. Et depuis, je n’ai pas arrêté de tatouer. Cela fait 12 ans maintenant, j’ai 36 ans. »
Teata ouvre une première boutique de tatouage après 7 années de pratique et une formation de Michel Hemanu à Raapoto. Au bout de deux ans et demi, son pari est gagné. Sa clientèle de Papeete, Paea, Punaauia, Papara et même Moorea ou Raiatea se déplace jusque chez lui.
« Les gens venaient vraiment pour mon travail, malgré la distance. J’ai fermé ma boutique pour partir en France, pour partir à l’aventure dans le tatouage. »
L'influence d'autres arts sur le tatouage
En 1999, Teata est graffeur. Pour lui, le graffiti c’était surtout une recherche de soi-même, une manière de s’exprimer durant ses années rebelles. Le graffiti, la sculpture, la peinture… Ces arts différents l’aident pour ses tatouages, au niveau de la construction du dessin par exemple.
« Si tu fais de la sculpture, tu auras des notions sur les reliefs qui vont te servir et s’adapter pour le tatouage. La peinture aussi, avec le travail que tu fais avec les couleurs, ça s’adapte aussi avec le tatouage. C’est la même façon de travailler, sauf que le support est différent. »
L'influence d'autres cultures sur le tatouage
« Découvrir l’Europe déjà, voir les différentes techniques qui se font là-bas. Ce que tu vois en vrai, c’est complètement différent, le rapport avec les gens. La culture est différente, en fait dans tous les points c’était carrément enrichissant. »
Au mondial du Tatoo en 2017 à Paris, Teata en prend plein les yeux lors de cet événement reconnu mondialement.
« Et moi j’arrive de Tahiti, directement dans cet événement-là, c’est comme un indien dans la ville. C’était énorme, j’ai vu là-bas des tatoueurs connus, en chair et en os, que je connaissais dans des vidéos ou des magazines, et là c’est le bonheur ! »
Invité par ses amis tatoueurs Mike et Laura Gantelme, Teata multiplie alors ses expériences de tatouage dans des salons de France (Bandol, Douai, Arras, Crépy en Valois, Calais) et de Belgique (Peck) et accumule les expériences qui le façonnent et font évoluer sa façon de voir les choses.
Ses différents styles de tatouage
S’il pratique essentiellement des tatouages polynésiens, Teata fait aussi des tatouages « réalistes », du « japonais », du « Patu Tiki », le tatouage marquisien.
« Tu peux mélanger du Patu Tiki, avec du samoan, tout en restant dans le noir. »
« Tu as aussi le « Polynésien moderne », et là tu y rajoutes des ombrages. Alors que le traditionnel, c’est à plat. »
« Ensuite tu as le « Polynésien Custom », c’est un mélange de genres, selon les envies. Par exemple tu peux avoir un Tiki, mais façon bio-organique. Tu peux avoir une légende polynésienne, mais tu la tatoues à la façon japonaise, ce n’est plus du « japonais », mais ce n’est plus du polynésien. »
L’objectif de Teata est de faire développer le « Polynésien Custom ». Il souhaite toujours pratiquer le « Patu Tiki », et le « Polynésien moderne », mais aussi faire évoluer le « Polynésien Custom ».
« Il faut qu’on laisse une trace de notre style de tatouage actuel. Il faut éviter de tomber dans la routine. J’aime bien faire des choses différentes, pas toujours tatouer du black, du black, il faut varier. »
Riche de son parcours, Teata marque aujourd’hui l’histoire de sa commune de Paea : « Parce que c’est la première fois que s’ouvre un salon de tatouage à Paea, historiquement c’est quand même quelque chose ! ».
Associé avec Mike et Laura Gantelme, qui ont mis leur salon de tatouage de Bandol en gérance, Teata est dans le partage. Toujours avec ses racines. Mais aussi avec des ailes.
Plus d'informations
Sur la page Facebook White Chapel Tattoo & Maohi Ink – Tahiti
Stéphane Bordereaux
Notes et interview
Tehina de la Motte
Rédactrice web
© Photos : Hommes de Polynésie (couverture), Gunt Photo Art, Teata Vauche