
Pascal Yen Kai Sun, de l’ingénierie marine au bricolage partagé
Hommes de Polynésie vous emmène aujourd’hui “bricoler” avec Pascal Yen Kai Sun. Ingénieur spécialisé en énergies marines, le trentenaire s’est reconverti il y a quelques années en créant Brico-Lab Tahiti, des ateliers partagés.
C’est dans un grand garage, en plein centre de Papeete, que Pascal Yen Kai Sun a ouvert son atelier de bricolage partagé. À l’intérieur, six grands établis en bois, tous dotés d’une belle panoplie d’outils, allant d’une série de clés, en passant par une gamme de tournevis ou encore une scie sauteuse.
« Le principe est le même que celui d’une salle de sport. Les personnes viennent utiliser les outils comme elles le souhaitent, et si elles veulent, elles peuvent bénéficier de mes conseils, comme avec un coach. »


Des études scientifiques
Aujourd’hui, Pascal Yen Kai Sun est un bricoleur averti et gère le lieu entièrement dédié à cette activité manuelle. Pourtant, il était loin de s’imaginer travailler un jour dans ce domaine.
Enfant, le jeune Pascal est attiré par l’océan et la pêche sous-marine. Très bon élève, après un bac scientifique obtenu à La Mennais, il part dans l’Hexagone.
« J’ai fait une prépa à Sainte-Geneviève à Versailles, puis j’ai intégré Centrale Lille où je me suis spécialisé en informatique industrielle et en e-commerce. »
Allier le métier d’ingénieur et le milieu marin
Une fois son diplôme d’ingénieur en poche, le jeune homme retourne à Tahiti travailler quelques mois pour Gaz de Tahiti.
« Je suis ensuite reparti faire un master en énergies marines renouvelables à Brest. Ce diplôme me permettait d’allier à la fois le métier d’ingénieur et la mer, que j’adore. »
L'expérience start-up
C’est alors le début d’une belle aventure. Pascal Yen Kai Sun est embauché par une start-up bretonne, spécialisée dans le développement d’hydroliennes.
« C’est le même principe que pour l’éolien, sauf qu’au lieu d’utiliser le vent, on utilise les courants marins. »
Pendant plus de cinq ans, le Tahitien participe avec passion à ce projet. En parallèle, il continue de profiter de l’océan et de la chasse sous-marine. Et cette passion va le conduire à une autre passion…
Bricoleur en herbe
« J’avais un copain très bricoleur, il m’a montré comment fabriquer un fusil de chasse pour attraper des thons. »
Si Pascal n’attrape pas de thons dans l’Atlantique, il devient un bon bricoleur en herbe.
« Cela m’a beaucoup plu, et je me suis même mis à fabriquer un fourgon en van aménagé pour voyager à travers la France. »
Retour au fenua
Fin 2016, l’entreprise Somalu lui propose un poste de directeur technique pour gérer le bureau d’étude de Somalu et de sa filiale Somasol, spécialisée dans l’énergie solaire.
« J’ai accepté et je suis rentré à Tahiti. Après mon retour, j’ai continué à bricoler, à fabriquer des objets que je ne trouvais pas ou qui ne me plaisaient pas, comme une tour d’observation pour mon fils. Le problème, c’est qu’il faut parfois acheter des machines qui coûtent cher et dont on ne se sert que deux ou trois fois. J’avais aussi des amis qui me demandaient des conseils ou de leur prêter du matériel. »
Le low-tech et l’entrepreneuriat
Si son travail l’intéresse et lui assure des revenus confortables, Pascal Yen Kai Sun a toujours eu au fond de lui, l’envie d’entreprendre. En 2022, il décide de démissionner.
« J’avais plusieurs idées en tête. En France, j’avais découvert le concept du low-tech et des low-tech labs. J’ai intégré l’incubateur Prism1. Cette expérience m’a permis de revoir mon projet, car il fallait qu’il soit viable économiquement. J’ai finalement décidé de m’orienter vers les ateliers partagés de bricolage et j’ai suivi une nouvelle formation au sein de Prism. »

Aménager l'atelier
Son projet et son business plan bien ficelés, Pascal choisit comme local un garage familial en plein centre de Papeete.
« Il a fallu tout aménager, refaire la toiture, les murs et l’électricité, puis j’ai fabriqué six établis et les ai équipés et toutes les autres servantes de l’atelier. »
Transmettre et apprendre
En août 2023, Brico-Lab ouvre ses portes et reçoit ses premiers bricoleurs et surtout bricoleuses.
« Plus de 70 % des clients particuliers sont des femmes. Je reçois aussi des comités d’entreprise et des entreprises qui cherchent des activités de cohésion d’équipe. Au fil du temps, j’ai étoffé mon catalogue d’offres et je propose maintenant aussi des ateliers pour enfants. Le bricolage développe la dextérité. Chaque personne qui vient à l’atelier est différente, chaque jour est différent. J’aime l’idée de partager, de transmettre, d’apprendre et de fabriquer soi-même quelque chose. »

¹ Incubateur de projets innovants de la Chambre de Commerce, d’Industrie, des Services et des Métiers (CCISM) de la Polynésie française.
Rédactrice
©Photos : Pauline Stasi et Brico-Lab pour Hommes de Polynésie
Directeur de Publications : Yvon Bardes




