
Robert Koenig, bibliophile engagé avec Haere Pō
Depuis 1981, Haere Pō édite et réédite des livres originaux ainsi que des ouvrages anciens consacrés à la Polynésie. À la tête de cette maison d’édition : Robert Koenig, ancien professeur de philosophie, et son épouse Denise. Pour Hommes de Polynésie, cet amoureux des livres a accepté de raconter son histoire.
Robert Koenig est né en 1943 à Montélimar mais c’est en Alsace qu’il réside avant de s’installer à Tahiti en 1969.
« Je ne voulais pas faire mon service militaire, donc je suis parti comme coopérant volontaire à l’aide technique. J’ai été envoyé à Tahiti en VAT 69, en tant que prof de philosophie dans l’enseignement protestant, au collège Pomare IV. »
L’amour des livres
Denise le rejoint un an plus tard. Ils se marient à Papeete. Mais Robert a un second amour, qu’il partage avec son épouse : ils sont tous les deux bibliophiles.

« Je collectionnais déjà des livres en Alsace et, en vivant ici, j’ai commencé à collectionner les livres d’ici, sur ici. Avec d’autres amis bibliophiles, on s’intéressait à l’Histoire, à tout et à n’importe quoi. C’est comme ça qu’on a fondé ensemble les éditions Haere Pō, en mai 1981. »
Mettre en valeur les langues autochtones
Au-delà de la culture et de l’histoire polynésiennes, Robert et Denise, qui ont l’expérience du bilinguisme en Alsace et dans le canton de Bâle, s’intéressent beaucoup à la question des langues autochtones et de l’accessibilité des textes.
« Nos premiers livres étaient trilingue, en français, anglais et tahitien, avec des illustrations faites localement. C’est l’une des points décidés dès le début : réaliser tous nos ouvrages ici, du texte aux illustrations et de la mise en page à l’impression.»

Un choix qui est devenu la marque de fabrique de la maison d’édition. Aujourd’hui, Haere Pō a édité près de 120 ouvrages : dictionnaires, romans, guides, livres pour enfants…
La Société des études océaniennes
Robert s’intéresse également au contexte politique de son époque.
« Dans les années 1970, on assistait à une nouvelle mouture des statuts. Je voyais bien que cela turlupinait tout le monde, alors je me suis dit que ça valait la peine de jeter un regard historique sur l’autonomie, les Établissements français d’Océanie… Je suis allé à la Société des études océaniennes et j’ai découvert leur bibliothèque et leur Bulletin. Cela m’a permis de proposer à mes élèves une forme d’instruction civique qui n’existait pas encore. »

En 1984, Robert devient membre de la SEO, puis son président en 1994. Il en est aujourd’hui l’un des administrateurs.
« Ce qui m’intéresse, c’est d’enrichir la bibliothèque de la SEO, d’alimenter son Bulletin (BSEO)avec des textes contemporains et anciens, de jouer avec la curiosité du public… »
Une amitié avec les Danielsson
Parmi leurs amis, Robert et Denise comptent Marie-Thérèse et Bengt Danielsson, qui a notamment participé à l’expédition du radeau Kon-Tiki menée en 1947 pour étudier le peuplement des îles polynésiennes depuis l’Amérique du Sud. Bengt est anthropologue et Marie-Thérèse, écrivaine, écologiste et militante antinucléaire. Le couple est connu pour son engagement en faveur de l’émancipation des peuples polynésiens.

« Marie-Thérèse était la véritable âme du couple. Elle écrivait, elle était courageuse et volontaire… Quant à Bengt, qui avait beaucoup d’humour, c’était un personnage étonnant, extraordinaire et respectable. »
À la suite du décès de Marie-Thérèse en 2003, Robert crée le site Arapo en leur mémoire, où il rassemble leurs livres, photos et articles… tout ce qui a trait à leur vie.
Cap sur l’horizon…
Aujourd’hui, Robert Koenig aimerait faire l’inventaire de son impressionnante et discrète bibliothèque, conservée dans son domicile de Punaauia où l’horizon s’étire à perte de vue.
« Il faut toujours avoir un horizon, des projets à venir, la publication de nouveaux livres… C’est ça, notre horizon. »

Lucie Ceccarelli
Rédactrice web
© Photos : Lucie Ceccarelli et Robert Koenig pour Hommes de Polynésie
Directeur des publications : Yvon Bardes