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Portrait

Andy Tupaia, une vie dédiée à la musique

Publié le 7 décembre 2017

Hommes de Polynésie a eu l’honneur de rencontrer un grand nom de la scène musicale polynésienne, dont la voix a probablement bercé votre jeunesse, Andy Tupaia. Andy est un musicien, chanteur, auteur et compositeur dont le style, dit-il, « se définit par la rythmique » : funk-brasilo-polynésien ou un savant mélange de sons vivants et dansants. Il produit actuellement son prochain album qui sortira début 2018.

DU QUARTIER AU CLUB MED

Andy découvre la musique dans son quartier. Autour de lui, tout le monde joue. Le soir, on se retrouve pour chanter, la guitare passe de main en main et chacun y met du sien. Ce sont ces moments de convivialité et de partage qui font naitre chez Andy cette passion pour la musique. À l’âge de 15 ans, il quitte l’école et part vivre à Moorea. Grâce à une tante, il entre au Club Med, un tremplin pour ce jeune musicien autodidacte, mais pas seulement.

« J’ai appris à dire bonjour, merci et au revoir au Club Med. Je venais d’un quartier où il était quasiment impossible d’entendre une phrase sans un gros mot. »

Andy apprend à être aimable, serviable et à aller vers les autres. Au Club, il est introduit au monde occidental et à ses sonorités. Des musiciens viennent de l’étranger pour jouer de la Funk, du Jazz, de la Pop, et Andy s’en imprègne.

« Au Club, la musique était riche et diversifiée. J’allais de découverte en découverte. Ça m’a vraiment ouvert. »

LE PREMIER ALBUM SOLO

Après 3 années passées au Club Med, Andy revient à Tahiti où il enchaine les gigs1 : boites de nuit, bars et restaurants, il joue un peu partout et se fait rapidement connaître. Les studios de production lui demandent de poser sa voix pour des compilations de variétés, essentiellement de la musique polynésienne populaire. Très vite, Andy se lasse, il veut diversifier son répertoire et apporter de la nouveauté au public polynésien.

« J’ai toujours voulu faire de la musique car j’ai quelque chose à dire, à partager. Je cherche à faire plaisir aux gens, à créer de l’unité et de l’échange. »

Dans les années 70, Andy retrouve Guy Roche, ami d’enfance et professeur de musique au conservatoire. Ensemble, ils collaborent sur le premier album solo d’Andy : Musique Api2. Cet album, ils l’enregistrent dans les studios Manuiti3 appartenant au père de Guy. Yves Roche a une conception de la musique qui diverge de celle qu’ont Guy et Andy :

« Il avait compris que pour être connu, il fallait faire de la musique commerciale, de la musique qui parle aux gens. Guy et moi étions de l’école du jazz, un genre musical qui ne plait pas forcément à tout le monde. Selon Yves, nous devions donner aux gens ce qu’ils veulent, ce qu’ils attendent, pour se faire accepter. »

La philosophie d’Yves est à l’origine du tube Roucouler Ukulélé qui propulse Andy au devant de la scène. Style musical avant-gardiste pour l’époque puisqu’il mêle Zouk et sonorités polynésiennes. Une modernité qui choque les anciens et séduit les jeunes.

L’ARRIVÉE D’INTERNET

Selon Andy, l’industrie de la musique dans les année 80-90, « c’était merveilleux ». La compétition entre les artistes locaux nourrissait la créativité de chacun. De nombreux tubes et albums, sortis durant cette période, sont devenus de grands classiques. Le public participait. Les gens achetaient de la musique car c’était le seul moyen de s’en procurer. Puis, il y a eu l’arrivée d’internet et l’industrie du disque s’est écroulée. Avec l’échange massif de fichiers musicaux peer-to-peer4, le téléchargement illégal et les nouveaux supports d’écoute, le CD est arrivé en fin de vie.

« L’arrivée d’internet a en quelque sorte tué la culture. L’art a du mal à faire rêver les gens car c’est devenu un produit de grande consommation. D’ailleurs, beaucoup d’artistes sont obligés de faire de la musique « fast food5 » pour suivre la cadence et la tendance. Une musique « fast food » c’est une musique que l’on créée rapidement, sans trop y réfléchir. C’est comme privilégier la quantité à la qualité. »

Andy tient tout de même à nuancer ses propos. Le web ne présente pas que des inconvénients pour les artistes indépendants6, bien au contraire. Grâce au streaming7, Andy peut par exemple analyser les données d’écoute et ainsi savoir quels morceaux les auditeurs préfèrent. Des statistiques que la radio et la vente de CD ne pouvaient fournir. Avec l’avènement d’internet et surtout des réseaux sociaux, les artistes peuvent aujourd’hui fédérer des communautés de fans et partager directement avec eux leurs créations. Ils peuvent contrôler eux-mêmes leur image et faire leur propre promotion.

« Avec internet, tout est plus rapide. Il n’y a plus de limite, plus de frontière. Plus besoin de prendre sa vespa pour aller dans toutes les radios déposer son CD. »

Andy est impressionné par la nouvelle génération d’artistes polynésiens qui ont tous un fort potentiel :  Eto, Pepena, Sylvio Cicero et bien d’autres, assurent aujourd’hui la relève et participent à faire rayonner la Polynésie à l’étranger. Quel conseil donner à ces jeunes ?

« Restez vous-même, simples et humbles, et surtout concrétisez vos rêves et ne lâchez rien ! »

Plus d'informations

Sur la page Facebook d’Andy Tupaia

1Gigs : Performance musicale live

2Musique Api : Musique nouvelle

3Manuiti : Petit oiseau

4Peer-to-peer : Échange de données entre ordinateurs via Internet

5Fast food : Restauration rapide

6Artistes indépendants : Artistes qui ne sont pas produits par des maisons de disques

7Streaming : Lecture de musique en ligne en flux direct

Mereani Maraeauria
Rédactrice web

© Photos : Hommes de Polynésie

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