Polynésien en métropole – Fabrice : « mon métier ? Vous faire gagner de l’argent »
Préparer sa retraite, gérer son patrimoine et le faire fructifier… Est-ce possible en cette période de crise sanitaire ? Et ce, même si notre patrimoine se limite à peau de chagrin ? Certaines personnes spécialisées dans la gestion de patrimoine gravitent autour d’investisseurs à la recherche de rentabilité. L’un d’eux, Fabrice Convert, enfant du fenua, a fait de l’évaluation et de la prise de risques, son quotidien. Hommes de Polynésie a voulu en savoir plus sur son métier de conseiller en gestion de patrimoine, souvent méconnu en Polynésie.
UN GOÛT PRÉCOCE POUR LES CHIFFRES
« Mon père, militaire, partait beaucoup en mission. Maman nous élevait dix mois sur douze. À chaque fois que j’en ai l’occasion, je lui rends hommage : elle a fait un super job. »
Né à Papeete en 1983 d’une mère polynésienne et d’un père popa’a militaire, Fabrice passera le plus gros de son enfance dans le Var, à côté de Toulon. Il revient en Polynésie à 16 ans et y fait sa première et sa Terminale comptabilité à La Mennais.
« Dyslexique, j’ai été en STT car c’était plus facile que la voie générale. La lecture ce n’était pas mon truc, mais les maths, si. Un prof, monsieur TSU m’a fait adorer la compta. »
Le bac en poche, il rentre en métropole poursuivre des études d’expert-comptable et rejoindre sa compagne Clémence, avec qui il vivra dix ans.
« J’ai fait mes études en alternance et obtenu mon BTS comptabilité, mon DECF (bac+4) et mon DESCF (bac+5). Avec 4 frères et sœurs, il fallait se débrouiller. Même si je n’ai jamais manqué de rien, mes parents ne roulaient pas sur l’or. »
Avec l’accès à l’apprentissage, Fabrice travaille dans un cabinet d’expert-comptable. Il observe et apprend.
« Ça m’a permis de voir ce qui se passe dans chaque poste très tôt, et m’a donné envie d’évoluer. Je n’étais pas intéressé par la répétition. J’ai vite su que je préférais faire plus de conseil, ce qui voulait dire, poursuivre mes études et devenir expert-comptable. »
Après un retour en Polynésie de deux ans en 2007, Fabrice et Clémence reviennent en France, où ils auront leur fils Temana en 2008.
À L’ECOUTE DES BESOINS ET OBJECTIFS DES CLIENTS
« J’ai ouvert un cabinet de gestionnaire de patrimoine au Cannet-des-Maures. J’avais 25 ans, personne ne me connaissait, j’ai démarré de zéro. Pendant trois ans, je n’ai pas pris de salaire. Heureusement, Clémence m’a aidé, épaulé et permis de rester dans ce domaine. »
Le travail de Fabrice consiste alors à conseiller le particulier à préparer sa retraite, à investir. C’est alors qu’on lui présente un prospect pour des conseils liés à son avenir, puis à la succession.
« Je lui ai fait économiser beaucoup d’argent. Il m’a ouvert tout son carnet d’amis. Le cabinet a commencé à grossir à partir de la 4ème année. »
Il prend alors un bureau à Saint-Raphaël, et ouvre en 2016 un bureau à Paris. Les affaires marchent bien.
UN MÉTIER OÙ LA PRISE DE RISQUES EST OMNIPRÉSENTE
Son métier ? Faire faire des investissements risqués : placements financiers, immobiliers, courtage en banque, en assurances… Capter de l’épargne pour investir dans des projets immobiliers et proposer un service complémentaire aux banques, selon le niveau de risque que le client est prêt à consentir.
« On accompagne les promoteurs, les lotisseurs dans leur recherche de capitaux. On capte l’argent aussi bien auprès de petits porteurs que de gros clients. »
Pour y arriver, une bonne communication est indispensable.
« Le français n’a pas été éduqué au risque. Mais quand il comprend, il suit. Ça me plaît d’arriver à expliquer des choses assez compliquées de manière très simple à des néophytes et de voir dans leurs yeux que ce n’est pas compliqué. »
Victime collatérale de la crise sanitaire actuelle, Fabrice essaye de relativiser les choses.
« Mon business est très impacté, mais je ne suis pas vraiment inquiet. Heureusement qu’il y a les aides du gouvernement qui permettent d’aider les entreprises, et j’espère, de retarder les catastrophes sociales. »
UN BESOIN DE DIVERSIFIER SES ACTIVITÉS
Fabrice s’implique de façon bénévole au niveau de services de l’Etat français, à la préfecture de Nanterre, pour essayer de partager avec d’autres ce que le système d’éducation lui a apporté. Il met ses compétences techniques et fiscales au profit de ceux qui en ont besoin. En parallèle, il investit sur un projet familial.
« Cela n’a pas marché, mais c’est aussi dans les échecs que l’on apprend. Quand mon fils sera plus grand et autonome, ma prochaine vie, ce sera en Polynésie. Je me lancerai dans un autre business. Sans doute à Raiatea où mes parents vivent à la retraite. »
Fabrice a envie d’investir dans l’agriculture, de prendre le temps de bien faire les choses, de manière réfléchie.
« C’est important pour moi de revenir avec tout ce que j’ai pu apprendre à droite et à gauche et d’y amener les compétences acquises. Tout est possible quand on y croit. »
Tehina de La Motte
Rédactrice web
© Photos : Fabrice Convert